Le terroir marseillais : une histoire de caractère

Le vignoble des environs de Marseille s’étend principalement sur les appellations Côteaux-d’Aix-en-Provence, Côtes de Provence et surtout Cassis pour les blancs qui font la fierté locale. Le climat est méditerranéen pur jus : été chaud, hivers doux, brise maritime parfois capricieuse. Le calcaire règne en maître sous les pieds de vigne, offrant une fraîcheur et une salinité reconnaissable entre mille dans les vins produits ici.

Les cépages emblématiques proposés dans les caves de Marseille

Derrière la pierre chaude des caves, voici les variétés de raisins qui font vibrer les verres marseillais.

Parmi les blancs locaux : entre soleil et fraîcheur

  • Rolle (ou Vermentino) : Cépage star du pourtour méditerranéen, le Rolle raffole du soleil et rend bien hommage à Marseille. On le retrouve des calanques aux étals de la ville ! Il donne des vins blancs floraux, aux notes de poire et d’agrumes, avec une touche d’amande. On en fait volontiers le compagnon des poissons grillés.
  • Clairette : On dit d’elle qu’elle est plus vieille que le mistral ! C’est l’un des trésors du vignoble provençal, irriguant aussi bien Cassis qu’Aubagne. Sa signature ? Une bouche soyeuse, complexe, souvent marquée par des notes de fruits à chair blanche et d’herbes sèches. Parfois minoritaire dans les assemblages, elle est pourtant très recherchée, notamment pour l’élégance de ses blancs.
  • Bourboulenc : Si son nom évoque une danse occitane, c’est aussi un raisin capable de faire virevolter les papilles. Ce cépage modeste en apparence apporte une vivacité unique et participe, avec le Rolle et la Clairette, à la personnalité des blancs de Cassis (qui, soit dit en passant, représentent aujourd’hui plus de 70% de la production de l’AOC Cassis, source : Fédération des Vins de Cassis).
  • Ugni blanc : Couramment rencontré dans le sud, il entre dans la composition de nombreux vins régionaux, apportant fraîcheur, légèreté et une belle acidité. Il accompagne rarement la dégustation en solo, mais complète parfaitement les autres cépages.

Les rouges et rosés, enfants du soleil

  • Mourvèdre : Certains l’appellent le « phénix provençal », car il a su renaître après la crise du phylloxera de la fin du XIXe siècle. Puissant, charnu, parfois un brin ténébreux, le Mourvèdre donne à Marseille ses vins rouges les plus profonds (et entre dans l’assemblage des rosés). On le retrouve aussi dans la célèbre appellation Bandol, mais les caves marseillaises savent aussi l’acclimater avec panache. Selon les chiffres de l’INAO (Institut National de l’Origine et de la Qualité), il représente environ 23% des surfaces plantées en AOC Bandol.
  • Grenache noir : Impossible de passer à côté de ce pilier du Sud. Il adore le soleil et s’exprime ici dans un registre gourmand et épicé – parfait avec les spécialités de la Méditerranée. Il apporte rondeur et générosité, aussi bien dans les rouges que dans les rosés.
  • Cinsault : Le secret d’un bon rosé provençal réside souvent dans la touche légère et fruitée du Cinsault. Son parfum délicat, ses tanins discrets et ses saveurs de fruits rouges en ont fait un incontournable des assemblages à Marseille, où l’on aime les vins qui glissent sur le palais tout en gardant du caractère.
  • Carignan : Longtemps mal-aimé, ce cépage revient en force chez de nombreux vignerons naturels de la région. Il insuffle des notes de fruits noirs et d’épices, de la puissance, et – suprême atout – vieillit admirablement bien.
  • Syrah : D’origine plus septentrionale, elle a su trouver une seconde maison dans les vignobles méridionaux. On la croise régulièrement dans les caves marseillaises, apportant structure et notes réglissées.

Cave traditionnelle ne veut pas dire vin oublié

Une cave traditionnelle à Marseille, ce n’est pas un musée du vin ! C’est un lieu vivant, où l’on retrouve aussi bien les cépages ancestraux que de belles surprises issues de la redécouverte de variétés oubliées. Parmi les cépages qui réapparaissent doucement sur les étagères, on peut citer le Tibouren, un cépage rare qui affectionne les bords de mer et qui donne des rosés à la couleur pâle et à la fraîcheur remarquable.

Autre clin d’œil : quelques vignerons s’amusent à replanter de petites surfaces d’Aramon dans la région, un cépage historique très utilisé au XIXe siècle avant d’être abandonné pour sa productivité excessive. Sa renaissance, timide mais réelle, témoigne d’une volonté de préserver un patrimoine végétal en péril.

Assemblage ou monocépage ? Les habitudes marseillaises

Dans le verre, le choix d’un assemblage ou d’un vin monocépage dépend d’abord du style recherché. Les vins de Marseille, surtout en caves traditionnelles, sont souvent des mélanges subtils. Impossible de ne pas penser au fameux blanc de Cassis, généralement issu de trois ou quatre cépages assemblés (Rolle, Clairette, Marsanne, Ugni blanc…), chaque année dans des proportions ajustées selon la météo.

Mais la mode du vin naturel – et le goût des vignerons pour l’authenticité – a aussi mis en valeur certains vins de cépages, qui permettent aux amateurs de découvrir la personnalité unique d’une variété. C’est parfois le cas pour le Rolle, la Clairette ou même certains Mourvèdre élevés en solo dans des amphores ou des cuves béton – pour ravir les puristes.

Petite anecdote : le vin local à l’international

Fait amusant : parmi les caves marseillaises, certaines n’hésitent plus à exporter leurs meilleures bouteilles. Résultat ? En 2023, selon les chiffres du CIVP (Comité Interprofessionnel des Vins de Provence), près de 35% des volumes produits dans le grand Sud-Est partent à l’export – un bel exemple de mondialisation bien assumée. Les Américains raffolent notamment des rosés de la région, mais les Japonais sont aussi friands des blancs de Cassis pour accompagner leur poisson cru !

Comment reconnaître un cépage local lors d’une dégustation en cave ?

Détecter un cépage local, c’est un peu comme retrouver un vieil ami sur le Vieux-Port : on procède par indices.

  • Le Rolle : souvent, il séduit par une bouche ronde et fraîche, avec des arômes de fleurs blanches, de poire et de pomme. Une légère pointe de salinité fait sa signature.
  • Clairette : attention, acidité plus souple, texture ample, et une finale parfois un peu amère – mais en finesse. À rechercher surtout sur les vins blancs secs.
  • Mourvèdre : robe sombre, souvent du caractère… on sent la prune, le poivre, la violette, et parfois un petit côté sauvage qui fait écho à la garrigue.
  • Cinsault : vins assez clairs, nez sur la fraise, la framboise, et parfois des notes délicates de fleurs. Parfait pour l’apéritif !

La meilleure façon de se faire la main ? Demander conseil au caviste local, qui se fera un plaisir de guider curieux et connaisseurs dans cet itinéraire de cépages.

Des caves où savourer l’âme des cépages locaux

Parmi les adresses incontournables à Marseille pour savourer ces cépages dans leur plus bel habit, difficile de passer à côté de quelques institutions – mais aussi de nouveaux lieux où la passion du vin naturel souffre un vrai vent de renouveau.

  • La Part des Anges (3 Rue Sainte, 1er arrondissement) : une institution du vin naturel, immense sélection de vins locaux et d’ailleurs.
  • Vin Nature (28 Rue des Trois Rois, 6e arrondissement) : ici, place aux petites cuvées, avec un accent mis sur la Clairette et les belles découvertes de Cassis.
  • Le Caveau du Sommelier (104 Cours Julien, 6e) : excellent choix de vins rouges typiques, conseils passionnés et ambiance de quartier.
  • La Cave de Baille (138 Bd Baille, 5e arrondissement) : un repaire à connaisseurs où le Tibouren fait parfois des apparitions surprises.

Sans oublier bien sûr de nombreuses caves éphémères lors des marchés ou des événements comme Urban Wine Trail, réunissant une douzaine de caves chaque automne pour une balade dégustation à travers la ville.

Une invitation à (re)découvrir la richesse locale

Choisir un vin local à Marseille, ce n’est pas choisir la facilité : c’est franchir la porte de traditions vivantes qui ne cessent d’évoluer, tout en préservant des cépages parfois mal connus au-delà des frontières du Sud. Derrière chaque verre, une promenade méditerranéenne où pamplemousse, herbes sèches, fruits rouges et notes minérales composent la symphonie du terroir. Le tout accompagné d’un accent chantant et d’une belle envie de partage !

Pour aller plus loin, la Fédération des Vins de Cassis, le CIVP ou l’INAO proposent régulièrement des cartes et des dossiers très complets sur les surfaces plantées, l’évolution des cépages ou les tendances de consommation (vinsdeprovence.com, vins-cassis.com, inao.gouv.fr).

Que l’on soit amateur de grands classiques ou d’authenticité surprenante, les caves marseillaises réservent toujours une pépite à qui prend le temps d’aller à leur rencontre. C’est le meilleur moyen de plonger, verre en main, à la source de la Méditerranée.

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