Lorsque le vin fait mal : un vrai casse-tête pour les sensibles

Certains souffrent de maux de tête, de douleurs digestives, de rhinites ou autres petits désagréments après un verre de vin. Ces sensibilités ne sont pas un mythe : selon une étude de l’Université de Californie (2018), 8% des consommateurs réguliers de vin déclarent ressentir systématiquement des effets secondaires inconfortables, sans pour autant être franchement allergiques (Nature Scientific Reports).

  • Les céphalées immédiates, parfois nommées « red wine headache ».
  • Des réactions cutanées chez certains, comme des rougeurs ou démangeaisons.
  • Une sensation de congestion nasale, souvent assimilée à une réaction allergique.
  • Des inconforts digestifs ou « lourdeurs » ressenties au niveau de l'estomac.

Rien de vraiment glamour, convenons-en… Mais à quoi ces réactions sont-elles dues ?

Sulfites : petits composés, grands débats

Premier accusé sur le banc des responsables, le sulfite (ou dioxyde de soufre, SO2). Ce conservateur est utilisé depuis l’Antiquité pour stabiliser les vins, limiter les bactéries et éviter l’oxydation. Mais en excès ou pour les personnes sensibles, sa présence peut provoquer :

  • Maux de tête, migraines
  • Irritations respiratoires (asthme, rhinites)
  • Picotements, réactions cutanées

Il existe une limite européenne à 150 mg/l pour les vins rouges, mais la moyenne d’un vin conventionnel tourne souvent autour de 100 à 140 mg/l (Ministère de l'Écologie).

Le vin naturel, lui, se distingue clairement : la charte AVN (Association des Vins Naturels) recommande de ne pas dépasser 30 mg/l – et nombre de vignerons vont jusqu’à 0 mg/l. Résultat : les quantités ingérées deviennent quasiment anecdotiques pour l’organisme. Pour un verre de 12 cl de vin naturel, la dose de sulfite ne dépassera pas 3,6 mg… Autant dire une pincée de sel dans l’océan !

Des additifs et intrants en (beaucoup) moins grande quantité

Le vin conventionnel peut contenir jusqu’à une cinquantaine d’additifs et substances diverses (levures exogènes, enzymes, gomme arabique, tanins œnologiques, colorants, agents de collage d’origine animale ou végétale…). Si tous ne sont pas systématiques, l’étiquetage ne les détaille que rarement (Les Echos).

Les personnes hypersensibles – notamment celles souffrant d’intolérances alimentaires, d’allergies ou de « terrain atopique » – peuvent réagir à ces intrants. Là où le cahier des charges du vin naturel impose une intervention minimale et l’exclusion de la plupart de ces additifs, le risque de réaction est largement réduit.

  • Vins naturels : en général, seulement du raisin, parfois un peu de soufre à la mise en bouteille.
  • Vins conventionnels : jusqu’à 35 additifs autorisés en Europe, dont certains issus d’allergènes (protéines d’œuf, lait, caséine…)

Une étude menée par la revue Food Chemistry (2022) révèle que l’absence d’additifs œnologiques dans les vins naturels diminue la présence d’agents potentiellement allergisants de 80% par rapport aux vins conventionnels – de quoi rassurer les palais les plus sensibles.

La fermentation naturelle, maître mot de la vitalité digestive

Le vin naturel privilégie les levures indigènes, présentes naturellement sur la peau des raisins ou dans l’environnement du chai. Contrairement aux levures sélectionnées (souvent issues de l’industrie agroalimentaire), ces souches « sauvages » offrent une fermentation plus complexe, vivante… et, selon certains chercheurs, plus facilement assimilée par l’organisme (Frontiers in Microbiology).

  • Les levures indigènes seraient mieux reconnues par notre microbiote intestinal.
  • La fermentation naturelle génère des arômes plus complexes, mais surtout des vins moins « standardisés » (et donc moins susceptibles de contenir certains résidus de fermentation inaboutie, difficiles à digérer).
  • Les vins « vivants » conservent aussi parfois plus de composés bénéfiques liés à la fermentation (vitamines, aminoacides, etc.).

D'où une meilleure digestion, et souvent moins de « coup de barre » post-apéritif pour les amateurs…

Le cas des histamines : mythe ou réalité ?

Petit mot pour les allergiques : l’histamine, molécule naturellement générée pendant la fermentation alcoolique, est parfois mise en cause dans les réactions allergiques au vin (bouffées de chaleur, maux de tête, démangeaisons).

Mais surprise : selon des analyses menées par l’Institut National de la Recherche Agronomique (INRAE), les niveaux d’histamines ne dépendent pas tant du « camp » naturel ou conventionnel, mais bel et bien de la maîtrise de la fermentation et de l’hygiène du chai. Un vigneron naturel méticuleux produira donc des vins tout aussi digestes qu’un bon vin bio ou raisonné sur ce critère précis (INRAE).

  • Les vins naturels bien faits présentent en moyenne moins de 5 mg/l d’histamines, contre 2 à 10 mg/l dans beaucoup de vins conventionnels (source : INRAE, rapport 2020).
  • Les mauvaises pratiques d’hygiène peuvent tout changer, quel que soit le mode de production !

Donc, toujours privilégier les vins faits avec soin, quelle que soit l’étiquette.

Moins de sucre, moins d’excès… plus de joie ?

Un autre facteur très concret de la meilleure tolérance de certains vins naturels, c’est leur teneur en sucres résiduels : la fermentation poussée à son terme (plus fréquente dans le naturel) permet d’obtenir des vins plus secs, avec moins de sucres cachés que dans certains rouges « conventionnels » ou rosés à la mode.

  • Un vin naturel sec titre le plus souvent entre 0 et 2 g/L de sucres résiduels.
  • Certains vins traditionnels, « marchés » comme secs, affichent jusqu’à 6 g/L (et jusqu’à 14 g/L en moelleux ou demi-secs).

Rappel : une consommation excessive de sucres dans l’alcool est très éprouvante pour le foie et le pancréas et génère une déshydratation accrue (pensez-y pour la prochaine soirée où l’on oscille entre blanc moelleux et gâteau d’anniversaire…)

Des témoignages de terrain : la parole aux concernés

Au-delà de la chimie et des chiffres, que disent celles et ceux dont le corps « cause » après un verre ? De vraies personnalités des réseaux sociaux et du monde du vin confirment ce phénomène :

  • Fanny Agostini, journaliste et animatrice : « Je ne bois plus de vin qu’en biodynamie ou natural. Les lendemains sont bien plus doux ! » (conférence Les Rencontres du Végétal, 2022).
  • Un sondage (mars 2023) sur la page Instagram @Vinsnaturels a recueilli plus de 200 retours : 67% des répondants se déclarent « mieux » ou « significativement mieux » après dégustation de vin naturel vs conventionnel, surtout côté migraines ou digestion.
  • Dans le podcast « La Terre à Boire », plusieurs sommeliers estiment que le vin naturel permet une meilleure endurance lors des « marathons » de dégustation, grâce à sa fraîcheur et sa digestibilité accrue.

Sans pouvoir (encore) généraliser, la tendance est là, et elle ne vient pas seulement des amateurs invétérés : nombre de médecins, nutritionnistes et chercheurs soulignent cette différence et appellent à plus d’études sur le sujet (The Conversation).

Le vin naturel : ni panacée, ni tour de magie ! Les limites à connaître

Attention : un vin naturel n’est pas une potion miracle pour tous. L’alcool reste de l’alcool, et il contient des éléments potentiellement irritants quelles que soient les pratiques de vinification (tanins, histamines, éthanol…). Certaines personnes continueront à ressentir des effets, même avec le plus pur des vins naturels !

Mais en observant la réduction significative de sulfites, de résidus d’additifs, et d’agents allergènes, il est compréhensible que les personnes sensibles profitent enfin de leur verre sans finir au lit à 22 heures – ou avec le fameux « casque sur la tête » du lendemain.

Au-delà de la tolérance : choisir le vivant et le partage

Si le vin naturel est parfois mieux toléré, il porte en lui une philosophie du « moins mais mieux », de la simplicité et du respect de l’organisme. Moins d’ajouts, plus de vivant et une volonté farouche de préserver le lien à la terre et au plaisir partagé. Boire du vin naturel, c’est aussi s’offrir une parenthèse où la convivialité, en toute légèreté, ne rime pas avec « sacrifice du lendemain ».

Pour celles et ceux qui souhaitent explorer cet univers, une recommandation : optez pour les vignerons engagés dans des démarches transparentes et goûtez en toute curiosité. Vous pourriez bien découvrir qu’au-delà de la nouveauté, il y a dans le vin naturel une promesse ancienne : celle d’un plaisir sain, joyeux et fidèle à sa terre.

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